... et ça se passe lors d'une randonnée à Cornus, aux Championnats du Monde en Allemagne, à ceux de France à Lyon et au sommet du Mont Ventoux...
lundi 31 décembre 2012
mardi 14 août 2012
La Cornusole
Dénivelé
positif cumulé 400m.
La machine que je vais utiliser est bien sûr ma XH.
J’ai refais pour l’occasion la protection de cadre avec un morceau de pneu et
une plaque en plastique. Le tout bien fixé au fil de fer. Je vais pouvoir taper
sans angoisse. Je me muni de deux gourdes d’eaux sachant que le parcours n’a
aucun ravitaillement. J’ai pris aussi deux ou trois gels en cas de « coup de mou ».
On attaque par Cornus-Vinens. 100m de dénivelé positif.
La piste est caillouteuse, quasiment que de la montée, très peu de poussée. A
partir de Vinens, sur quelques centaines de mètres, on peut pousser un peu mais
le final est un mur qui mène au plateau. Après 30’ d’effort, enfin du plat et
du goudron qui mène alors vers la descente. Attaquer ainsi à froid, c’est chaud !
Puis, descente vers ferme de Camplong. Là, c’est
un magnifique single qui se faufile
entre les arbres. Quelques passages techniques et difficiles. En bas de
la descente, une piste vallonnée serpente vers la ferme. On passe une paire de
guets (à sec en cette saison). Cette
partie est très ludique avec beaucoup de relances. Je tiens tête aux vtt dans
cette partie. On remonte ensuite vers le hameau de Canals sur le plateau du
Guillaumard. Là, marche obligatoire pour moi. Mes petits cousins en VTT mettent
pieds à terre. Trop dur. Les adultes en 1X2 forcent comme des mules. Je marche
à grand pas et arrive au sommet avec le groupe des adultes. Nous attendons les
« pitchous ». Il fait très chaud et j’ai finit mes deux gourdes
d’eau. Nous cherchons de quoi boire. Fort de mon expérience, je me dirige vers
l’église. A défaut de fontaine, il y a toujours de l’eau à coté des cimetières
dans les petits villages. Ca ne loupe pas, un robinet se trouve à l’entrée du
dit cimetière contre l’église. Je bois comme un fou et remplit mes gourdes prêt
pour la suite. Le reste de la troupe nous rejoint. Un de mes petits cousins
avait crevé avec son tandem VTT (un
monstre le truc !) d’où le retard.
Liaison
Canals/les Aires par un superbe petit chemin parallèle à la route, dont une partie
en sous-bois très ludique.
Descente vers Sorgues à partir du hameau des Aires.
2100m de long, on part de 731m
d’altitude et on arrive à 588m soit -143m. (-6.8% de moyenne). Descente longue et difficile. Bourrée de
cailloux roulant. Obliger de s’arrêter au milieu de la descente pour se
reposer, c’est dire !! Dans cette descente, impossible « d’allumer », les cailloux sont
gros, ça tabasse, ça glisse, on a souvent un pied à terre pour rectifier, bref
épuisant. Surtout pour les bras qui en prennent plein la gueule. Les jeunes en
VTT dont le tandem me doublent à tombeau ouvert (le jeune débranche son cerveau en descente…). L’arrivée se fait
dans le village de Sorgues en passant devant la source du même nom. On arrive
trempé, parce que le guet passé n’était pas sec lui. Mais avec la chaleur, le
rafraîchissement est un bienfait. La bande de jeunes nous attend. Arrêt
papotage/débriefing et ravitaillement puis la troupe reprend la route pour
quelques kilomètres bucolique en longeant
la rivière de la Sorgues naissante.
Petit tour vers La mouline.
Remonter à Cornus par la Tuderie. Montée à pied très
raide en aidant François. Je porte à bout de bras ma XH et son VTT sur certains
passages. Merci la muscu ! Très difficile, surtout avec quasi 2h dans les
pates. Aucune possibilité de pousser dans cette portion. La plupart des
VTTistes pousseront leur machine. Impossible pour eux de pédaler, même en 1X1.
Il me
reste encore un quart d’heure (hors GPS)
dans la côte pour remonter jusqu’à la maison. Je finis donc par une montée vers
le plateau en marchant parfois parce que je n’en peu plus … la XH est une enclume …
Distance
|
Vitesse Max
|
Roulage
|
Moyenne Roulage
|
Arrêts
|
Moyenne Globale
|
22
Km
|
37
Km/h
|
1h53’
|
10,7
Km/h
|
38’
|
8
Km/h
|
jeudi 2 août 2012
Championnats du Monde. St Wendel Allemagne
250 coureurs, 19 nations représentées. Les 2/3/4 août.
Mais c’est quoi ce problème que j’ai avec mes casques. Une fois sur deux je les oublies. Heureusement que j’ai toujours le plan B. Là j’étais persuadé d’avoir pris mon superbe casque intégral et non… bouh bouh hou.. Obligé de me rabattre sur mon bon vieux casque de Dirt qui pèse une tonne.
1er jour : Sprint
« Jean Christophe ? ».
Je viens de terminer mon Sprint. Je suis en pleine recherche d’oxygène. Moins d’une minute d’effort explosif à pousser, à s’en arracher les cuisses. J’ai l’impression qu’elles ont doublée de volume. J’ai la tête qui tourne. La bouche grande ouverte je remplis mes poumons au maximum et expire autant. Je ventile, je ventile. Il me faut rattraper le déficit en oxygène. Dans quelques minutes ça ira mieux je le sais, mais pour l’instant, je suis toujours à bloc. Légère envie de vomir mais j’ai eu pire, ça ira. Je suis accroupi au fond de la piste. Quelqu’un me parle derrière moi. Je me retourne. Un gars me tend la main. « You are Jean-Christophe ? » « _yes » Je connais cette tête. Ce regard bleu clair aux reflets acier, ce sourire illuminé. Vous voyez le genre de mec comment dire … gentil! Celui qui ne ferait pas de mal à une mouche. Il s’excuse de te déranger pendant que tu récupères. Je connais cette tête. Je l’aie vue en photo mais en vrai il est bien plus jeune. « I’m Alpo Kuusipo ». Merde !! Je suis face au Dieu vivant de la trottinette !! La légende de notre sport. L’homme aux quatre poumons et deux cœurs. Celui qui trotte comme il respire. Même les Finlandais le considèrent comme un cinglé, c’est dire… Et il est là tout penaud de me déranger.
C’est mon tour. Sur la ligne de départ, penché en avant, je viens de bloquer la fourche en position basse. Tout mon poids est sur l’avant. Les deux freins écrasés pour me maintenir en équilibre. PAN ! Je lâche tout et commence à pousser de toutes mes forces. J’entends Christophe Quiniou hurler derrière moi de sa grosse voix « Pousse, pousse, maintiens ton inertie !! » Le poids de ma machine est dément à pousser, j’ai la XH, mais une fois lancée, elle sera aussi plus lourde et tiendras plus longtemps qu’un poids plume. C’est un pari. Je débranche mon cerveaux et pousse comme un cinglé en prenant soin de bien monter mon genoux, bien pousser sur l’arrière, accélérer le mouvement des jambes, bref aller le plus vite possible. Je surgis du dernier virage épuisé, et passe la ligne dans un dernier effort : 55’’.263… Je gagne 1 centième par rapport à 2010 et avec quelques kilo de plus à pousser !!
Manon après son tour de qualification se retrouve en finale ! Face à elle 3 hollandaises sur-entrainées. Croyant avoir fait un temps médiocre lors des qualifs, elle est retournée à la tente se reposer. Me voilà partir la chercher en courant « Manon, t’es en finale !! Vite c’est maintenant ! » « _Non, je ne veux pas !, j’ai aucunes chances» Négociation, palabre, Luc (notre champion) vient lui parler et la motive pour mettre au point une stratégie. Finalement, elle accepte. La tactique va être la suivante. Partir à la chasse de la troisième, (elles sont quatre en finale) et à mi parcours, en fonction de son écart et de sa forme, soit elle arrache un sprint final pour la battre, soit elle lâche tout, pas la peine de se faire mal la course étant perdue. C’est finalement la deuxième version qui sera mise en pratique. A la sortie du dernier virage, ayant trop de retard, elle mettra sagement en pratique nos recommandations et finira le « run » sagement. Evidement déçue par sa prestation elle restera néanmoins la seule « Non-Hollandaise » à avoir participé à la finale. Chapeau la gamine et vive la France!
La bécane est posée contre le mur. C’est une Kickbike Racer toute simple. D’origine. Les roues elles aussi sont d’origines. Seule concession à la recherche de performance, il n’y a pas de frein arrière. Le guidon a été remplacé par un modèle à l’anglaise genre « grand-mère » qui donne un air un rien surannée à l’ensemble. Elle est là toute seule. Elle tranche d’avec les modèles tout « Carbone » avec 2 roues de 700 à plusieurs centaines d’euros pièces. Des bécanes uniques faites sur mesure, qui pèsent un poids plume et font la fierté de leur propriétaires. Elles ont été conçues pour permettre à leur coureur de gagner. Débauche de technologie qui au final fait pâle figure face à la redoutable simplicité de cette machine posée nonchalamment contre le mur. Elle est à l’image de son propriétaire. Lumineuse de simplicité. Je me souviens de la phrase de Léonard de Vinci : « La simplicité est la sophistication extrême ». L’humilité à l’état pur. Alors messieurs. Posez vos engins qui valent une fortune, vos casques profilés et retournez à l’essence même de la course. Travaillez le moteur, pas la carrosserie. Arrêtez le « tunning ». Parce qu’une fois de plus on en revient toujours là. Il y a ceux qui compensent leurs faiblesses par une débauche technologique, ceux qui croient que la machine remplacera leurs cœurs, ceux qui se cachent derrière leurs casques profilés. Ceux qui ont besoin de reconnaissance et s’imaginent qu’on les prendra pour quelqu’un parce qu’ils ont une machine unique et un « look ». Mais au-dessus de tout çà, il y a la pureté. La simplicité. Un monde sans artifice. La machine n’est pas une fin en soi, c’est un outil banal. Et paradoxalement, c’est apparente banalité fait d’elle un modèle unique. Jalousée par toutes ses consœurs. Comment une bécane aussi simple peut-elle pulvériser toutes les concurrences ? Humilier des machines qui coûtent 10 fois plus chers ? C’est l’Opinel face aux couteaux de survie multifonctions à la Rambo. La pureté du son du crystal face à une symphonie de Wagner. D’ailleurs ça me rappelle l’anecdote des stylos mis au point pour les astronautes. Les Américains ont développés une technologie ahurissante pour mettre au point un stylo permettant de fonctionner dans l’espace. Le défi était de taille : Il fallait que la structure résiste aux pires traitements en matière de pression atmosphérique, l’encre devait arriver à la bille malgré l’absence d’apesanteur. Des mois d’études et des milliers de dollars pour arriver à mettre au point le stylo le plus évolué à nos jours. Chose que les russes possédaient déjà, puisqu’ils ont utilisé des crayons noir à papier …
2ème jour : Critérium 15Km
Je suis bougon ce matin. J’ai mal dormi. Je suis crevé, j’ai mal partout. J’ai le moral à zéro. La journée s’annonce mauvaise. Elle le sera. J’ai mal géré le critérium. Mauvais départ, mauvaise gestion de la course, mauvaise stratégie, mauvais choix de machine, le résultat est à la hauteur de l’ensemble. D’abord je prends la XH qui pèse une tonne. Manon faisant la course juste avant moi et vu le nombre de côtes, je lui laisse la Racer. Je décide de partir en queue de peloton pour gérer la remontée des retardataires. C’est souvent mon petit jeu. Sauf que là, dès le départ, tout le monde part à bloc et je ne remonterai personne. Je me suis fait prendre à mon propre piège. La réalité te recadre. Elle te met une claque en te disant « Pour qui tu te prends petit bonhomme? ». Même pendant la côte de départ où pour m’économiser je cours plutôt que pousser, je me fais doubler. J’arrive au sommet quasi dernier. Derrière moi il reste une petite demi-douzaine de « trop-vieux-pour-pouvoir-pousser » dont je serais le chef pendant toute la course. J’ai beau me démener dans tous les sens, la machine est vraiment trop lourde dans les côtes, aucune inertie au niveau des roues, le frein touche légèrement ce qui me ralenti, bref une horreur. Je suis d’ailleurs tout seul la plupart du temps. Mes prédécesseurs sont loin devant, et mon poursuivant loin derrière. Et pourtant mon temps n’est pas si mauvais, 43’ pour 15 Kilomètres. C’est tout à fait correct pour moi vu la difficulté. Reste le parcours : Magnifique ! Il tourne autour d’un golf, bourré de petites côtes, de descentes de virages. Il serpente dans la forêt. Par endroits surgit un green où des golfeurs pratiquent leur sport, puis replonge dans les sous-bois. Le temps est magnifique. Il fait très beau, très chaud, mais la plupart du circuit se trouve à l’ombre des grands arbres. Un véritable plaisir. On peut choisir ses trajectoires aux petits oignons. Mais à chaque descente correspond le mur à grimper qui suit. Je ne peux pratiquement rien pousser. Mon camion est trop lourd, trop haut. Et pourtant j’ai bloqué la fourche en position basse. Ca ne suffit pas. On peut trafiquer ce qu’on veut, mais une bécane de tout-terrain, c’est fait pour le tout-terrain !! J’en ai encore sous le pied et finit au sprint en évitant que mon poursuivant me rattrape. Petite satisfaction. Je termine en 43’16’’ classé 118/124 en 15,766 de moyenne.
Arrivée du critérium. |
Manon quant à elle doit effectuer la même course que les seniors. 5 tours. Elle ne se sent pas de la faire. Fatiguée de la veille, pas trop le moral « ca sert à quoi que j’y aille, je vais encore me faire battre !! ». D’autant qu’ayant repérer le parcours avec elle, elle le trouve hyper dur. Je suis d’accord. Pour son niveau même en y allant cool, ca va être énorme. Je mets donc au point avec elle le plan suivant : A chaque passage, je la surveille, regarde son état. Je serai seul juge quant au fait de l’arrêter si je sens qu’elle va craquer. Elle me fait confiance et prend donc le départ. Trois tours suffiront à l’achever. Dès le deuxième passage, je la vois serrer les dents, fatiguée, mais tenant bon. Tout au mental (comme son père ). Dès le troisième passage, je la vois en bout de ligne droite arriver dans un sale état. Je surgi sur la piste et la bloque. Elle est en larmes et veux continuer. Niet. Pas question. Je lui dis qu’elle n’est pas là pour se faire mal et que je décide de la fin de sa course. Pas question qu’elle insiste. Elle n’insistera pas d’ailleurs, elle est épuisée.
3ème jour : Marathon
J’ai une pêche énorme ce matin. Tout le contraire d’hier. C’est la journée du marathon et la dernière journée dans ce pays. Le temps est encore au beau fixe. Manon ne faisant pas le marathon (ça suffit pour elle après ce qu’elle a vécue les deux derniers jours…), je prépare la Racer pour l’épreuve. Avec Christophe, nous partons le matin reconnaître le parcours. Nous sommes rejoints par Karel et Ivana. Plans en mains, en anglais, nous cherchons le parcours exact tous les quatre. Il s’agit d’un aller-retour sur une route, une côte d’une centaine de mètre à près de 15%, puis dans la foulée on la redescend de l’autre coté, puis passage dans un quartier résidentiel avec plusieurs virages en angles droit. Le tour fait 2,5 Km et il faudra le parcourir 18 fois ! Enfin, le premier fera les 18 tours. Les autres finiront leur tour dès qu’il aura franchit la ligne.
Le départ du Marathon. |
Pour le départ, changement de stratégie. Je ne me mets pas en dernière ligne. C’est la guerre ! Dès le « READY ! », je me faufile dans la masse et grignote quelques places. Ce coup ci, je ne vais pas me faire avoir. PAN ! On démarre. Je me lance dans un gymkhana à travers les coureurs. Sur les 100 premiers mètres je fais comme avec ma moto dans les embouteillages de Montpellier. Slalom entre les véhicules. J’attaque ainsi le premier virage en milieu de peloton. Les plus rapides que moi me doubleront, tandis que ceux à mon niveau, ne me reprendront pas. C’est toujours ça de gagné. Après une série de gauches/droite dans les rues du quartier, nous sommes devant le mur. Tout le monde pousse à fond. Je me fais doubler par des fusées, je double certains (déjà ?) à l’agonie. Je surgis au sommet après une dernière poussée et plonge dans la pente allongé sur le guidon. Pas pour longtemps, car en bas, virage à gauche serré avec passage dans un caniveau. Il faut donc visser l’endroit où poser sa roue, parce virer à plus de 20 Km/h sur les pavés, on peut partir en vrille et ne rien rattraper… Ensuite, une ligne droite sur du bitume parfait. On peut envoyer du gros ou en profiter pour se reposer un court instant. Virage à 180° et retour sur la même route. La encore, on essaye de garder un rythme soutenu si possible. C’est dans cette portion aller/retour qu’on peut essayer de voir sa position. A l’aller, on croise ceux que l’on poursuit. Tour après tour, on repère l’endroit où l’on croise celui qu’on a choisit. A-t-on de l’avance ? Du retard ?
Au retour, on croise ceux qui vous poursuivre. Même question mais à l’envers. Est-ce que je maintiens mon avance ? Au fil des tours, on se fait doubler par les premiers. Le peloton de tête emmené par Alpo va me doubler 5 fois !! On finit par ne plus savoir si on reprend un tour à quelqu’un ou on le double simplement. Si celui qui vient de te doubler te prend un tour ou une place. J’ai deux cibles. Yannick devant moi à qui j’essai de prendre un tour et Karel que je maintiens derrière moi. Pour le reste, la course vit sa vie. On double, se fait doubler. On choisit ses trajectoires la plus parfaite possible, parfois on ne peut pas quand le peloton arrive derrière. Ils hurlent, alors on se pousse et on leur laisse la place (politesse oblige). A la fin de l’aller-retour sur cette ligne droite, un gauche/droite en légère descente qui se négocie sans pousser. Tout en position de vitesse. Trajectoire serrée (quand on peut) et après une courte remontée (sur la vitesse acquise), on se remet à pousser pour franchir la ligne d’arrivée. Et on recommence. Pour mes ravitaillements, j’ai mis en place le même système qu’en Italie. Quand j’ai besoin d’eau je jette ma gourde à Manon ou à Lou qui me la prépare pour le tour d’après. Le passage de la gourde se fait à la manière d’un relais. L’une ou l’autre m’attend dans la ligne de droite du départ et dès que je surgis elle se met à courir en tendant la gourde. Je l’attrape et repars. Zéro faute. J’ai une équipe d’enfer. Comme je le disais, Alpo m’a doublé plusieurs fois. Dont une dans la côte. Imaginez vous dans une côte à 15%, pousser à fond. De toutes vos forces à 8/9 Km/h. Content parce qu’on double des gars qui poussent plus lentement que vous, ou qui ont mis pied à terre en totale perdition. Toi, tu sens tous tes muscles répondre. Ton cœur qui pompe parfaitement. Tes poumons sont au max. Ta machine biologique est au top. Et tu entends un TAP/TAP/TAP… c’est Alpo (et ses poursuivants…) qui arrive derrière toi. T’es presque au sommet, l’endroit où le mur s’accentue et lui te doublent droit comme un I en plein sprint à quasi 20 Km/h sans la moindre notion de souffrance sur son visage. Même le public s’arrête de crier et le regarde passer médusé. Je croise du regard Carole qui est là pour nous encourager, « Carole, comment il fait ? » Elle me regarde, hausse les épaules dans un geste d’impuissance et me lâche un « je ne sais pas… » .Désabusée.
Au retour, on croise ceux qui vous poursuivre. Même question mais à l’envers. Est-ce que je maintiens mon avance ? Au fil des tours, on se fait doubler par les premiers. Le peloton de tête emmené par Alpo va me doubler 5 fois !! On finit par ne plus savoir si on reprend un tour à quelqu’un ou on le double simplement. Si celui qui vient de te doubler te prend un tour ou une place. J’ai deux cibles. Yannick devant moi à qui j’essai de prendre un tour et Karel que je maintiens derrière moi. Pour le reste, la course vit sa vie. On double, se fait doubler. On choisit ses trajectoires la plus parfaite possible, parfois on ne peut pas quand le peloton arrive derrière. Ils hurlent, alors on se pousse et on leur laisse la place (politesse oblige). A la fin de l’aller-retour sur cette ligne droite, un gauche/droite en légère descente qui se négocie sans pousser. Tout en position de vitesse. Trajectoire serrée (quand on peut) et après une courte remontée (sur la vitesse acquise), on se remet à pousser pour franchir la ligne d’arrivée. Et on recommence. Pour mes ravitaillements, j’ai mis en place le même système qu’en Italie. Quand j’ai besoin d’eau je jette ma gourde à Manon ou à Lou qui me la prépare pour le tour d’après. Le passage de la gourde se fait à la manière d’un relais. L’une ou l’autre m’attend dans la ligne de droite du départ et dès que je surgis elle se met à courir en tendant la gourde. Je l’attrape et repars. Zéro faute. J’ai une équipe d’enfer. Comme je le disais, Alpo m’a doublé plusieurs fois. Dont une dans la côte. Imaginez vous dans une côte à 15%, pousser à fond. De toutes vos forces à 8/9 Km/h. Content parce qu’on double des gars qui poussent plus lentement que vous, ou qui ont mis pied à terre en totale perdition. Toi, tu sens tous tes muscles répondre. Ton cœur qui pompe parfaitement. Tes poumons sont au max. Ta machine biologique est au top. Et tu entends un TAP/TAP/TAP… c’est Alpo (et ses poursuivants…) qui arrive derrière toi. T’es presque au sommet, l’endroit où le mur s’accentue et lui te doublent droit comme un I en plein sprint à quasi 20 Km/h sans la moindre notion de souffrance sur son visage. Même le public s’arrête de crier et le regarde passer médusé. Je croise du regard Carole qui est là pour nous encourager, « Carole, comment il fait ? » Elle me regarde, hausse les épaules dans un geste d’impuissance et me lâche un « je ne sais pas… » .Désabusée.
Luc me double en m’encourageant dans la ligne droite. Il file à la poursuite du groupe de tête. Lui aussi me prend plusieurs tours. Je double Serge qui marche à coté de sa trot. « Qu’est ce qui y’a ? » « _j’ai crevé ! » Je ralentis. « Tu veux de quoi réparer ? » Sourire de sa part « Non tant pis, file ! ». Course terminée pour lui. Il assistera à mon passage Free-Style dans la descente. En effet, un moment d’inattention dû à la fatigue, je négocie mal je virage dans le caniveau en fin de descente et la bécane glisse de l’arrière. Je prends tout le virage en contre braquage, un pied sur la planche, l’autre en l’air dans une position d’équilibre instable, mais je ne tombe pas et repars le poing en l’air « YIIHAAAA !! ». Applaudissements de la foule massée là.
Au fil des tours la fatigue s’accentue. Je le vois lors de l’ascension de la côte. J’arriverai à la pousser à bloc jusqu’au dernier tour où je craque et pose les deux pieds à terre presque au sommet. Je marche les derniers mètres avant de plonger dans la descente. Je ne compte pas les tours. En fait, je ne sais pas du tout où j’en suis jusqu’ à ce que l’organisation m’annonce qu’il reste 2 tours lors de mon passage sous l’arche gonflable de l’arrivée. Alpo me doublera lors de ce tour, qui du coup sera le dernier pour moi. Je termine en 1h30’41’’ classé 96/123. En 20,195 de moyenne pour 13 tours. Alpo fera premier en 1h28’ pour 18 tours… Il pousse tellement fort que sa machine décolle à chaque remontée de jambe. Il avance tel un kangourou en sautant. On n’avait jamais vu ça. Le Finlandais bondissant !
Après les épreuves allemandes je passe 81/150 au classement Eurocup soit (54) dans mon classement. Manon est 6/6 en Femme Junior et Lou 8/8 en pupille.
Conclusions :
Aucunes crampes. Est-ce dû à ma préparations spécifiques sur les jambes ou la durée insuffisante avant leurs déclenchements ? Je ne sais pas.
Malgré mon entraînement à la hauteur de ma réputation, je reste toujours dans mes temps de référence. Même mieux au sprint avec en plus une machine pas du tout prévue pour.
Un dernier mot concernant l’organisation. La coté « carré » des allemand est une pure fiction, un phantasme. On se demande comment des gens pareils on pu envahir l’Europe en 40. Ce fut un BORDEL sans nom : Pas assez à manger, rien à boire (vous y croyez à çà ? pas d’eau de disponible aux repas !!) des changements de parcours à la dernière minute, personne au courant de rien, une seule personne à l’accueil des 250 concurrents, incroyable… Par contre on comprend leur puissance économique : La moindre bouteille d’eau était payante. Pathétique …L’absolu contraire des Italiens qui eux urent une organisation quasi militaire !
La légende... |
Demande de ravitaillement pour le prochain tour. |
dimanche 10 juin 2012
Open de France. Lyon.
Samedi matin. J’ai bien dormi. J’ouvre un œil, regarde le réveil : 7h. Merd..., merd…, merd…, c’est l’heure à laquelle j’avais prévu de partir. Debout à fond, déjeuner, dernier préparatifs à bloc, 7h45 je suis sur l’autoroute. Je DE-TES-TE partir à la bourre. Mais le coté positif c’est que j’ai dormis une heure de plus. Alors l’un dans l’autre, ça n’est pas si mal… J’arrive sur le site vers 10h15.
Fin juin, on prend les mêmes et on recommence. Les habitués de l’ « European-Circus » se sont donc retrouvés ce week-end de fin juin à Lyon. Ce rassemblement est à la fois une « concentration » (genre concentration motos) où compétiteurs, familles, amis se retrouvent pour passer le week-end ensemble et une épreuve sportive. On y retrouve donc nos amis allemand (Hans-Christian qui finit toujours dernier et qui vient avec ses bonnes bouteilles de vin rouge de chez lui), hollandais, slovaques (Talibor et sa femme : 1700 Km pour venir passer un week end avec nous !!), tchèques (mon éternel concurrent Karel, on finit toujours ensemble années après années), les Finlandais (tous les ex et actuels champions du monde) et tous les potes français. C’est LE rendez-vous pour les coureurs français. Les anciens sont tous là, pleins de petits nouveaux pointent leur nez. Nous sommes plus d’une soixantaine inscrits.
Les machines présentes sont toujours plus ou moins les mêmes. Kickbike, BCS, Kotska, Effendi, Zockra. La grande absente est la marque Footbike. On peut mesurer la qualité d’une machine à sa présence dans les paddocks…
Le week-end va être très chaud. En température et en tension. Outre le fait qu’on est content de se retrouver, la compétition est tout de même là. Certains sont affutés comme des sabres de samouraïs et viennent là pour « péter » un chrono, d’autres (dont moi) sont là pour participer quelque soit le résultat (ça n’empêche pas qu’on aime bien se tirer la bourre quand même). Au menu, un contre la montre de 2,5Km, un 10Km, le Relais et un Marathon. J’ai prévu de participer aux deux premières courses, le Relais étant trop violent pour moi. Quant au marathon je me réserve de savoir si je le fait ou pas. On verra suivant les résultats du premier jour.
Après avoir salué tout le monde et récupéré ma plaque et mon « chips » (le truc électronique qui va calculer mon temps), je me renseigne sur le repas de midi. Je n’ai quasiment pas déjeuner et j’ai faim. Il me faut des forces pour cet aprèm. Et là, j’apprends qu’il n’y a rien de prévu…. Heu …. On me dit que je peux aller fouiller dans les frigos les restes du petit déjeuner mais c’est tout. Bon d’accord, je compte sur les nouilles de la veille et en attendant je vais me « gaver » de petits pains au lait. On verra bien.
1er jour : Contre la montre 2,5Km
12h50. On part dans l’ordre inverse des dossards (je suis le n°32) toutes les 10 secondes. Le parcours est le même depuis le début de cette épreuve il y a deux ans. Une piste parfaitement goudronnée qui serpente autours d’une petite forêt. Des lignes droites, des virages serrés, de la relance, deux mini-bosses, bref très technique et ludique. Le sol est bitumé, terrain de prédilection des machines surbaissées.
Je repère le circuit en poussant disons… à 60% de mon régime pour voir mon temps dans ses conditions : 7’30’’. Je vise donc la barre des 7’.
Départ officiel : 3, 2, 1…Je pars à bloc en poussant le plus vite possible. Dès la mi-parcours (environ 3’) je suis asphyxié. Je passe en mode « survie » et je finis à l’agonie avec une envie de vomir qui surgit passé la ligne d’arrivée. J’ai trop forcé. Et à froid en plus (malgré les 78°c au soleil).
Mon résultat : 6’22’’. Je fais une pointe à 32Km/h. Le meilleur, un jeune Hollandais en 4’58’’. Il se permet de battre le Roi Kai Immonen.
J’ai une bonne heure et demie avant la course suivante. Avec Thierry et un autre concurrent nous partageons le pique-nique d’Isabelle (« Merline ») et son mari. Force Pâté, Jambon et vin blanc. Un peu de dopage Bio ne fais pas de mal, vu ce qui nous attend.
Anecdote : Le premier Français du contre la montre ne participera pas aux 10Km. La veille il a un peu trop arrosé sa première rencontre avec les Français. 5litres de bière au gin. Il a finit le contre la montre dans le camion des pompiers sous oxygène et direction l‘hôpital. Il reviendra dans l’après midi rassuré sur sa santé mais raté pour le 10Km…
1er jour : Critérium 10Km
Il est 14h30. Le soleil brûle. Les quelques zones d’ombres sont prises d’assaut. Il doit faire au bas mot dans les 35°c. Je bois sans arrêt. Le casse croûte m’a fait du bien mais tout à coup j’ai un gros doute. Extrême chaleur + vin blanc, c’est un cocktail explosif pour les crampes. D’autant que le run de tout à l’heure m’a laissé des traces quant aux sensations musculaires…
On va tourner 4 fois sur la piste du contre la montre. Nous somme 59 au départ. Certains n’ont pas fait le contre la montre pour ne pas se pourrir. Je pars moins à bloc que tout à l’heure et je me mets immédiatement au rythme que je pense tenir. C'est-à-dire entre les 7’30 de l’entraînement et les 6’22 du contre la montre. Mon objectif étant moins de 30’, je garde un bon 22Km/h au compteur. A moi à tenir ce rythme sur les 10 bornes. Je suis avec mon tchèque préféré Karel (mon éternelle doublure), Jean-Charles Quiniou (14ans le môme !) puis une paire d’autres. Le premier tour est fait pour prendre ses marques. On a tous le même rythme. Je le passe en 6’41’’. Deuxième tour, la fatigue pointe son nez mais c’est aussi le cas de mes voisins. On maintient l’allure. 6’41’’. Troisième tour, la fatigue s’accentue. Deux coureurs de notre groupe s’éloignent lentement. Je perds quelques secondes en arrêtant la poussée pour prendre une gorgée d’eau, mais j’en avais besoin. J’en propose d’ailleurs à Jean-Charles qui n’a pas de gourde. La chaleur est impressionnante. Le soleil tape très fort. Je suis toujours avec Jean Charles Quiniou et Karel. Le jeune Quiniou a une bécane magnifique préparée par son père. Une superbe bête de course « Si tu n’as pas un bon résultat, ton père m’as dit que tu aurais une trot rose « Hello Kitty »… » Eclat de rires de sa part, il sprinte en criant « Noooonnn…. ». Vers la fin du troisième tour j’entends un bruit bizarre derrière moi. Un raclement étrange. Une sonorité de roulements pourris. C’est Alexander le LongBoarder qui nous double. Et pas lentement !! Je regarde mon compteur, 24Km/h et il me prend facile 2Km/h… Il pousse bizarrement (pour nous bien sûr) avec une rotation du torse et des bras. Fichtre ! Qu’est-ce qu’il avance le gars !! Mais comment fait-il ? Je passe pour la troisième fois devant le Chronos en 6’55’’.
Dernier tour. Quelques secondes après mon passage, le premier arrive en 20’52’’. Je continue en cherchant à être bien régulier. Je dois rester dans mon rythme. En aurais-je assez pour pouvoir faire un sprint final ? Je colle mes adversaires. Dans l’ordre : Jean-Charles, Karel et moi. Dernière ligne droite. Plus qu’une centaine de mètres. J’accélère le rythme, passe le tchèque, ré-accélère, arrive au niveau de Jean-Charles et lui hurle « Vas-y sprinte ou je te passe !! ». Pendant les quelques secondes de sprint je vais le pousser dans ses retranchements en lui criant dessus « Pousse, pousse, Go, Go !! ». Il s’arrache comme un fou et me devance sur la ligne d’un centième se seconde… Je finis en 27’39’’720’’’ (dernier tour en 7’09’’) et lui en 27’39’’600’’’ !! Je suis super content, je « perd » 3 secondes en deux ans sans aucun entraînement. D’autant que je n’avais pas touché à ma bécane depuis fin Janvier pour le Ventoux.
Le soir, grosse ambiance et gros repas. Nous sommes installés au bord du Lac avec une vue magnifique. Idyllique. Malgré la chaleur toujours présente on dévore comme des ogres avec moulte bières. Dodo à 23h mort de fatigue avec début de migraine suite à l’effort.
2ème jour : Marathon
6h. Le soleil tape sur la tente. A l’intérieur il y fait grand jour. Je me lève après une bonne nuit et m’avance vers la table géante du petit déjeuner. Luc est déjà debout et met la table. Nous somme rejoint peu à peu par tout le staff français. A 7h, tous le monde est là, les étrangers sortent de leurs tentes de ci de là. Je ne ferai pas le Marathon et vais me joindre aux bénévoles (50 en tout) pour garder la route. La course est un circuit de 8Km à parcourir 5 fois. A chaque tour, plus de 150m de dénivelé. En tout c’est presque 800m que les coureurs auront dans les jambes.
Christophe nous place sur un passage très dangereux. Il s’agit d’un double virage en angle droit. Un gauche, puis 50mètres de descente à 15% dans le gravier puis un droit. Nous balayons la piste afin de la sécuriser. Les graviers sont mis de coté. Avec la petite Kotska de Thierry nous prenons différentes trajectoires de la descente pour être sur de notre coup. Nous posons des cônes de chantiers devant chaque piège (poteaux électrique, muret). Je me poste au sommet devant le premier virage et Thierry en bas devant le second. Nous attendons la meute. A chaque passage, je fais de grands signes pour les faire ralentir. Dès qu’ils surgissent dans la pente, Thierry en bas fait de même. Les passages sont de plus en plus rapides. Lors de la première boucle, tout le monde est passé doucement, debout sur les freins, un pied par terre en raclant pour ralentir. Le seul à la passer intégralement à pied est le LongBoarder. Trop dangereux. Puis au fur et à mesure des tours, les premiers sont passés de plus en plus vite. A l’arrière le freinage et la descente sont pris avec prudence mais devant, c’est sport de glisse. Les 5 premiers passent à bloc. Kai, Hannu, Luc sont impressionnants. Le pire de tous est Kai. Il arrive face à moi allongé en recherche de vitesse, tourne sans freiner, « enquille » la descente sans la moindre notion de freinage et prend l’angle droit du bas dans une trajectoire parfaite. Le tout dans une sensation de fluidité et de maîtrise de la machine qui laisse sans voix. Je repense alors que la Finlande a donné comme champion Haari Vatanen, Kimi Raikonen. Ils ont le sens de la trajectoire dans les gênes. Hannu utilise la même technique en légèrement moins rapide. Mais ce qui devait arriver arriva… Au troisième passage, alors qu’il se bagarre avec Hannu pour la deuxième place et qu’il est talonné par un jeune Tchèque, Luc rate son virage en bas et chute de tout son long. Pomette éclatée, menton ouvert (plusieurs points), épaule et bras grandement tuméfié (brûlure au second degré). Du sang partout. Il se relève et veut repartir. Thierry et moi tentons de l’en empêcher, il a du sang partout, tourne sur lui-même, complètement désorienté il veut repartir à contre sens. Il finit par nous fausser compagnie et repars à fond. On est inquiet. Je remonte à mon poste en courant et maintenant gueule après les concurrents qu’une chute a eu lieu « Somebody fall down, slow, slow !! ». Ca calme pas mal d’ardeurs !
Il n’y aura plus de chutes. Luc va repasser en troisième position pour son tour suivant. Il a l’air d’avoir la forme (malgré sa gueule et son bras en sang). Ouf…
Le vainqueur (Kai bien sûr…) en 1h38’01’’. Sur le podium à la remise des prix, apprenant que Luc s’est vautré gravement alors qu’il était en train de revenir sur lui et que cette chute lui a fait perdre la deuxième place, Hannu considérant que Luc aurait pu le gagner, échange sa deuxième place avec lui et prend la troisième. Grandeur de la Finlande !
Voilà, le week-end est terminé. On sort des frigos de quoi faire un dernier buffet froid et en grignotant autour d’un verre on refait les courses. Beaucoup sont en train de plier leurs tentes, ils ont pas mal de bornes à faire (1700 pour les slovaques). En discutant avec Dalibor le Slovaque, grand habitué des épreuves de l’Eurocup, il me dit qu’en France nous avons la meilleure bouffe, le plus beau site pour mettre les tentes, les plus beaux parcours et surtout le marathon le plus dur, le plus technique de tous les Européens. Et ça, il aime ! Tout comme les Finlandais qui ont vraiment beaucoup aimé la difficulté de la journée. Plus c’est dur, plus ils sont bons. Je fais le tour de tous les concurrents encore présents et je leur dit au-revoir, (See you in Germany !). Un dernier papotage avec les amis et zou, je rentre à la maison.
dimanche 22 janvier 2012
Mont Ventoux
Trois voies sont réalisables. Sault, la plus longue et
la plus facile par l’Est. Malaucène, la plus courte au dénivelé inégal par le
Nord et Bédoin, la plus difficile par le Sud. C’est cette dernière que je
tente. Quitte à faire le Ventoux autant prendre celle-là. Si je ne le fais
qu’une fois dans ma vie j’aurais pris la voie royale. D’autant que comme le dit
le proverbe : « Si plusieurs
chemins s’offrent à toi choisit le plus difficile, c’est celui où il y a le
moins de monde ». Le dénivelé est en moyenne de 7% avec des passages à
plus de 10%. Sachant que ma limite haute est de 6%, à priori, je ne vais pas
pouvoir faire grand-chose. Ce qui me motive d’autant plus. L’année dernière Luc
(le grand champion de la discipline en France) a poussé jusqu’au sommet en
moins de 2 heures, Sébastien et Carole (d'autres champions) sous la barre des
3h.Mieux que la plupart des cyclistes qui tentent l’aventure. Mais ce sont les meilleurs trotteurs
français. Conclusion : Et d’une c’est faisable en trot, et de deux, jaloux
comme je suis, pas question de leur laisser l’exclusivité d’avoir accroché le
Ventoux à leur tableau de chasse. Quitte à marcher ou à courir les ¾ de la
montée, je vais me le faire. Et comme je suis joueur, je choisis la pire
période de l’année quant aux conditions: Fin Janvier ! Comme ça je
vais justifier mon temps minable…Et puis il me nargue depuis pas mal d’années.
Je le vois de toute sa masse chaque fois que je prends l’autoroute, j’ai dû
annuler trois fois son ascension au dernier moment pour des problèmes de météo et de disponibilité. Là il fait beau, j’ai la
dispo, bref comme on dit dans l’aérospatiale, il y a une fenêtre de tir. Ne la
ratons pas.
Si je fais du 5Km/h de moyenne (que je marche, courre ou pousse) je devrais mettre dans les 4h. La
moitié d’un Millau, fastoche non ? Reste des paramètres inconnus :
L’altitude, on monte à 1900m !, le vent, (on passe le col des tempêtes) il peut-être infernal (record au sommet en 1967 : 320Km/h)
et le froid. Ce dernier je sais le gérer. Pour le reste on verra, je
m’adapterai. La route aussi. A priori elle serait fermée l’hiver à partir du
Chalet Reynard, soit 6 Km avant le sommet. Je verrai si je peux passer sinon ça
me donnera une bonne raison pour abandonner avant la fin.
Le parcours : De Bédoin (Alt 350m) jusqu’à St Estèphe (Alt 540m) 5Km de pente
douce, histoire de se mettre en jambe. Là on attaque 10Km jusqu’au Chalet
Reynard (Alt 1400m), soit 1000m de dénivelé, le calcul est simple : 10%. Il
va donc y avoir 10 Km d’enfer. Du Chalet au sommet, 6Km où l’on prend 500m de
dénivelé. Le final est presque une ballade vu ce que l’on a passé…
Cette introduction a été écrite quelques jours avant
l’affrontement (car s’en est un).
Maintenant place au jour J :
La
montée
Dimanche 22 janvier, 9h30 du matin, je lance mes
premières poussées sur la D974 en direction du Ventoux. Coté technique, j’ai
équipé ma Racer de deux gourdes d’eau, j’ai avec moi de quoi grignoter, je me
suis chargé à minima. J’ai quand même mon appareil photo pour immortaliser la
chose. Coté tenue, je suis en équipement grand froid. Coté physique, je n’ai
pas plus d’entraînement qu’à l’habitude. Mais j’ai mon secret : J’ai mangé
des pâtes hier soir !
Il fait 13° au départ mais il y a un grand vent. Je
démarre équipé complètement, il ne fait pas chaud. Les 5 premiers kilomètres
d’approche sont en fait plus « pentus »
que je ne le pensais. Il y a même un passage à 8%. Le vent tourne dans tous les
sens avec néanmoins une tendance par l’arrière. Je tiens un petit 12 Km/h.
Comme un oignon, j’enlève petit à petit mes couches, accroche mon casque à mon
guidon mais je garde le bonnet, le vent reste froid. Enfin St-Estèphe et son
fameux virage qui marque le début de l’ascension. Pose nutrition et étirement.
Distance
|
Vitesse Max
|
Roulage
|
Moyenne Roulage
|
Arrêts
|
Moyenne Globale
|
6
Km
|
20,7
Km/h
|
31’
|
11,6Km/h
|
5’
|
9,9
Km/h
|
Je marche
quelques temps pour voir comment se situe le dénivelé. Gulp… Même en marchant
ça grimpe. Je tente une poussée mais je dépense une énergie folle pour une
vitesse de 6/7 Km/h. Je préfère marcher un peu en attendant que ce soit
poussable. Je tiens un 5Km/h, alors autant rester comme çà. Je passe mon temps
à mettre ma cagoule, mon blouson, puis enlever ma cagoule, mon blouson. J’ouvre
mon blouson, un coup de vent glacé, je le referme… J’ai chaud, j’ai froid c’est
n’importe quoi. Une ligne droite, je tente une poussé, je dérape ! Le sol
est humide à souhait, mes chaussures dérapent, je fais du sur place. Bon,
j’attends et je marche encore. Je retente en posant le pied d’appui à l’endroit
où le bitume à l’air plus sec. Je suis à 7/8 Km/h, mais une rafale me stoppe
net. Et merde… Pendant les dix kilomètres qui me séparent du Chalet, je vais
pratiquement marcher tout le temps. Impossible de démarrer la moindre poussée. Ca
glisse et il fait froid.
Un grondement s’élève au loin. Il grandit de plus en
plus. Surgit du virage derrière moi une Audi R8 (pour les ignares, c’est un truc genre Ferrari, aussi rare, large, bas
et puissant mais fabriqué par Audi) qui passe à toute allure et disparaît
au virage suivant. Faudra que j’en parle au papa d’Elisa (cherchez pas à comprendre c’est perso…). Le silence reprend ses droits doucement. Quant
à moi, je reprends ma marche. Et dire que ce mec va monter en une dizaine de
minutes (record absolue de la montée en
voiture : 6’ et quelques…).
Distance
|
Vitesse Max
|
Roulage/dont marche
|
Moyenne Roulage
|
Arrêts
|
Moyenne Globale
|
10
Km
|
20,7
Km/h
|
1h16
/ 40’
|
7,9
Km/h
|
14’
|
6,6
Km/h
|
A chaque arrêt, j’en profite pour me ravitailler avec
forces gels énergétiques et je bois beaucoup. A mi pente, la forêt se fait
moins dense, on voit apparaître le sommet. L’humidité du sol disparaît laissant
place aux rafales de vent. Toujours pas la peine de pousser. De temps en temps
j’arrive à lancer la bécane quand je sens que le dénivelé diminue, mais une
centaine de mètres plus loin, le % aidé par le vent m’arrête. Alors je marche
et je repense à mon pote" Dexter" qui disait qu’on est là pour le
paysage. Profitons en et mettons nous en plein les mirettes. Les alentours sont
magnifiques, le ciel est bleu, le soleil brille. C’est déjà ça. Un seul
cycliste me doublera très lentement pendant l’ascension. (c’est d’ailleurs le seul que je verrai de la journée) Il a un BTWIN
basique. On papote en avançant ensemble. Il a tenté de le faire hier, trop de
vent au sommet, alors il retente aujourd’hui. Pendant 5 mn, j’oublie mes
crampes qui veulent se déclencher. Il s’éloigne lentement.
Chalet Reynard. 2h50’. J’y arrive en poussant avec le
vent de face.
Distance
|
Vitesse Max
|
Roulage/dont marche
|
Moyenne Roulage
|
Arrêts
|
Moyenne Globale
|
15,6
Km
|
20,7
Km/h
|
2h21
/ 1h40’
|
6,6
Km/h
|
28’
|
5,5
Km/h
|
Je me prends une pose en essayant de trouver un coin
protégé du vent qui tourne dans tous les sens ce fourbe. Il fait toujours froid
et je reste bien habillé. Je m’enfile la moitié des gâteaux que j’avais prévus,
une compote et un gel énergisant. Je prends
10’ de repos complet et repart pour la dernière partie. 6Km et 500m de
dénivelé positif. Maintenant le paysage est désertique. Lunaire. La route est à
flanc de montagne, la vision s’étend jusqu’à la mer. Dès le début, étant
protégé du vent, je peux pousser un peu. Mais au premier virage une rafale me
stoppe. Je reprends la poussée, elle me re-stoppe. Ok j’ai compris je marche.
La neige a fait son apparition. Le bord de la route est recouvert de « névés » et la route est traversée
par des petites mares. La neige fond. La t° est donc positive mais le vent est
glacial. L’altitude (on est entre 1400 et
1900 et ça monte vite) m’oblige à respirer plus profondément. Je n’arrive
pas à respirer à fond par la bouche mon masque me gêne. Je l’enlève quand il
n’y a pas de vent, le remet lors des rafales, etc … Mon cycliste de tout à
l’heure surgit. « Je n’ai pas pu
arriver au sommet. Je me suis fait jeter par terre au col, c’est trop
dangereux, je redescends, bon courage et fais gaffe ». Une rafale
m’arrive dans le dos et me pousse sur 50 mètre en pleine côte à 6%.
Génial ! Mais elle tourne et me stoppe net. Bou-ou-ou… En marchant face au
vent je regarde mon GPS. 3Km/h !! Je passe au niveau des stèles des deux
cyclistes décédés lors d’une course à cet endroit. Le plus connu des deux
finira sa carrière professionnelle lors d’un tour de France à cet endroit.
Le vent est de plus en plus fort. Les rafales m’empêchent par moment de marcher. La dernière ligne droite avant le col. Il est devant moi. Le vent augmente, il hurle, c’est assourdissant. Une rafale plus forte me fait perdre l’équilibre. Je me rattrape de justesse et reste figé un genou au sol dans la position du sprinter dans les starting blocs. J’ai le col devant moi à 100m. Je mettrais 5mn à parcourir la distance courbé, avec parfois une main au sol. J’avance pas à pas en trainant la Racer. J’arrive enfin et me jette contre le muret dos au vent. 4h16’.
Le vent est de plus en plus fort. Les rafales m’empêchent par moment de marcher. La dernière ligne droite avant le col. Il est devant moi. Le vent augmente, il hurle, c’est assourdissant. Une rafale plus forte me fait perdre l’équilibre. Je me rattrape de justesse et reste figé un genou au sol dans la position du sprinter dans les starting blocs. J’ai le col devant moi à 100m. Je mettrais 5mn à parcourir la distance courbé, avec parfois une main au sol. J’avance pas à pas en trainant la Racer. J’arrive enfin et me jette contre le muret dos au vent. 4h16’.
Distance
|
Vitesse Max
|
Roulage/dont marche
|
Moyenne Roulage
|
Arrêts
|
Moyenne Globale
|
Dénivelé positif
|
21,1
Km
|
20,7
Km/h
|
3h23
/ 2h35’
|
6,2
Km/h
|
51’
|
5
Km/h
|
1500m
|
Je n’irai pas plus loin. Je reste à 1800m d’altitude.
Les 650 derniers mètres avant le sommet sont impossibles à faire dans ses
conditions. J’ai eu la trouille. La vraie. Pas longtemps mais quelques secondes
de vraie peur. Celle où tu te sent dépassé, tu ne maîtrise rien. Je me suis
fais soulever comme un fétu de paille et projeté en arrière sans pouvoir m’accrocher
à quoi que ce soit. Et derrière il y a le vide… La peur étant la meilleure des
assurances vie, j’arrête là. Je fais demi-tour. Je l’aurai une prochaine fois.
Blotti contre mon muret j’entends le vent qui hurle au dessus de moi. J’ai un
réacteur de 747 lancé à fond à quelques mètres de moi. On dirait une bête
sauvage hyper agressive. Je me sens tout petit. Là où je suis elle ne me voit
pas. Je passe lentement la tête de l’autre coté du mur pour apercevoir le
monstre en me tenant par précaution à un poteau. De l’autre coté, il fait très
beau, on voit les Alpes au loin. Paradoxal, l’image ne correspond pas au son.
J’ai une bande son de film catastrophe/horreur et l’image de la petite maison
dans la prairie. Les nuages passent par le col et accélèrent prenant celui-ci
comme un tremplin. Ils sont projetés au dessus de moi et retombent de mon coté
en se disloquant et en reprenant une autre forme. Poésie de la tempête. Les
nuages jouent. C’est peut-être leur Skate park ? Tiens, il y a un
cumulo-nimbus qui vient de « rentrer »
un superbe « Tail-win ». Et
là un stratus qui tente un « back
flip ». Bien joué ! Ouaw, un cumulus vient de rater un 360°.
Superbe saut, mais il s’est vautré. Il
ne ressemble plus à rien maintenant. Après quelques minutes de spectacle, il va
falloir que je m’éclipse de leur terrain de jeu.
La
descente
Toujours courbé, je reprends le couloir dans l’autre
sens. Le vent me pousse dans le dos en hurlant « CASSE TOI, ON VEUT PAS DE TOI ICI !! ». Je résiste pour
ne pas partir en courant. Je tomberais. J’ai le pack du XV
de France qui me pousse dans le dos… Avec la vitesse je glisse sur le sol
mouillé. Et passé le virage, le vent s’arrête. Comme un chien qui te poursuit
toutes mâchoires dehors et qui s’arrête net quand il considère que tu as franchis
sa limite territoriale. Il te regarde droit dans les yeux et semble te
dire : « Ne franchit pas cette
limite, sinon je te bouffe. Je ne t’ai pas eu cette fois –ci, je ne te raterai
pas la prochaine foi ». Avec un homme au moins on peut négocier. Pas là. La descente va s’avérer délicate.
Jusqu’au Chalet je vais subir les vents tourbillonnants et même me faire
arrêter en pleine descente (à l’endroit
ou le vent m’avais poussé dans le dos lors de la montée). Les mains sur les
freins je descends entre 20 et 30Km/h en prenant des coups de coté, devant,
derrière, je me concentre et tiens le guidon de toutes mes forces. Mes pieds se
font tremper à cause des remontée d’eau
(vous savez, les petits ruisseaux dont je
parlais tout à l’heure), manquait plus que ça, les pieds mouillés…J’ai les
freins à blocs sinon je partirai plein pot. Tu penses 6 à 7% de pente, la
bécane ne demande qu’à accélérer … Je passe le virage du Chalet dans le plus
pur style glisse-skate, le corps déhanché à l’intérieur du virage à 40Km/h. Superbe !
Je plonge dans la forêt où je retrouve le sol humide. Attention aux virages,
pas trop vite, d’autant que la route n’est pas fermée et que je croise des
voitures et des motos. Je ne peux pas
choisir les trajectoires idéales. Je reste debout les mains sur les freins et
reste à 50/55 Km/h (max atteint :
65Km/h) dans les lignes droites. Je n’ai presque plus de freins d’ailleurs.
Ces V-Brakes sont vraiment de la merde sur des côtes si longues. Je revois tous
les coins où je me suis arrêté tout à l’heure, où j’ai galéré. Maintenant c’est
très rapide. Je revis ma montée à l’envers et en accéléré. Marrant comme
sensation. Je repense à Dexter qui a poursuivi un cycliste à 80Km/h. Dans
d’autres conditions bien sûr, mais à ma vitesse c’est déjà assez rapide, alors
à 80Km/h même dans des conditions idéales, ce doit être impressionnant à vivre.
Les rafales tournantes font « guidoner »
atrocement la bécane. Je m’arrête vérifier le serrage de la roue avant,
l’alignement des freins. Il ne faudrait
pas que je me vautre à cette allure. Tout va bien, je repars
tranquillisé. Je suis obligé de bloquer
le cadre avec mes genoux et de m’allonger sur le guidon. La bécane ne bouge
plus, mais elle accélère et je dois d’autant plus freiner. Avec la vitesse
maintenant j’ai un peu froid surtout aux pieds, mais pas le temps d’y penser,
je suis trop concentré. Arrivée au virage de St-Estèphe en 35’ avec une moyenne
de 40Km/h pile. Je reprends les 5 derniers kilomètres en pente douce mais avec
le vent de face. Il me faut pousser pour maintenir un bon 25 Km/h. Arrivée à
Bédoin. C’est fini. Je jette la bécane et mon sac dans la voiture, mets le
chauffage à fond (sur les pieds) et rentre m’effondrer chez
moi. Au final (et qui n’a aucune
signification) j’ai couvert les 42Km aller-retour en 5h soit 8,4 Km/h de
moyenne.
Distance
|
Vitesse Max
|
Roulage
|
Moyenne Roulage
|
Arrêts
|
Moyenne Globale
|
21
Km
|
65
Km/h
|
36’
|
34,9
Km/h
|
8’
|
28,2
Km/h
|
Un dicton provençal dit : « N’est pas fou celui qui monte au Ventoux,
est fou celui qui y retourne ».
Alors je suis totalement cinglé parce que
maintenant j’ai un compte à régler avec l’animal. La prochaine fois ce
sera par Malaucène ou Sault, mais le cerbère là-haut qui garde le sommet,
j’attendrai qu’il dorme …
Profil en % de la montée, kilomètre par kilomètre :
2.5
|
3.9
|
4.8
|
5.9
|
5.4
|
6.3*
|
9.4
|
10
|
10.7
|
9.6
|
9.7
|
10
|
9.2
|
10.1
|
6.7
|
7.1
|
6.7**
|
7.8
|
7.4
|
8.9
|
10.1
|
* :St Estèphe
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